A partir du 1er octobre 2016, tous contrats, qu’ils soient nouvellement signés ou renouvelés, sont soumis aux nouvelles règles du droit des contrats, édictées par l’Ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.

D’une manière générale, cette réforme encourage la liberté contractuelle et la coopération entre les parties.

Elle offre plus de sécurité juridique et facilite ainsi les transactions internationales.

Toutefois, certaines dispositions débouchent sur un protectionnisme de la partie contractante la plus faible et, à la clé, une judiciarisation des contrats. Vous devez donc être vigilant afin de ne pas avoir de mauvaises surprises.

Cette réforme devrait vous inciter à modifier certaines de vos pratiques internes, du stade de la négociation de vos contrats jusqu’à leurs termes. De plus, il pourra être utile de procéder à un audit de vos contrats, afin d’identifier les améliorations indispensables pour une mise en conformité avec les nouvelles règles.

Nous présentons une sélection des principales règles qu’il conviendra d’appliquer dans vos relations contractuelles.

La nouvelle obligation de transparence et de coopération dans les pourparlers

Lors de toute négociation, vous devrez désormais informer votre co-contractant de tout ce qui peut déterminer son consentement, s’il l’ignore ou n’en demande pas communication en raison de relations de confiance existantes. Par exemple, lors d’une vente de fonds de commerce, toutes informations d’ordre juridique, fiscal ou commercial sur le fonds (à l’exclusion de celles portant sur l’estimation du prix) devront être communiquées. Si l’information n’a pas été fournie, les clauses affirmant le contraire seront inefficaces, le contrat pourra être annulé et des dommages et intérêts réclamés. Aussi, vous devrez anticiper sur les informations à communiquer susceptibles d’être déterminantes de l’accord de l’autre partie, ou selon le côté où vous vous placez, dresser une liste de celles dont la communication est souhaitée. De plus, il faudra garder une trace des informations communiquées.

Comment éviter les conflits entre CGV et CGA

En ce qui concerne vos Conditions Générales de Vente (ou d’Achat), l’importance d’obtenir leur acceptation par votre cocontractant (au mieux par écrit ou, à tout le moins, par un « comportement non équivoque ») est dorénavant codifiée. A défaut de quoi, elles seront dépourvues de toute efficacité. De plus, si votre cocontractant vous adresse ses propres Conditions Générales, sans que vous exigiez la renégociation des clauses qui sont contraires et incompatibles, vos conditions seront sans effet.

Comment sécuriser le pouvoir d’engager le cocontractant

Pour éviter l’inefficacité des contrats que vous signez, il est impératif de vérifier le pouvoir du signataire, qui peut résulter d’un pouvoir statutaire (selon les mentions portées sur l’extrait Kbis). A défaut d’un tel pouvoir, les nouveaux textes vous permettent de demander, par écrit, à votre cocontractant d’en justifier, dans un délai à fixer. A défaut de réponse, le cocontractant sera réputé habilité à signer votre contrat. En l’absence d’une telle demande, votre co-contractant souhaitant se désengager pourra réclamer la nullité du contrat, en démontrant que vous ne pouviez ignorer le défaut de pouvoir du signataire.

De l’importance de motiver la fixation unilatérale du prix

Dans vos contrats cadres (de vente par exemple), vous pouvez prévoir que le prix sera fixé ultérieurement par vous-même, mais à condition de pouvoir le justifier (en gardant trace de son mode de calcul), et sous réserve qu’il ne soit pas abusif. Sinon, votre client sera habilité à demander au juge la condamnation de votre entreprise au paiement de dommages et intérêts et la résiliation du contrat.

De l’intérêt de rédiger des contrats équilibrés

Dans les contrats d’adhésion (c’est-à-dire non négociés), les clauses significativement déséquilibrées seront réputées non écrites. A la différence de la notion de déséquilibre significatif du Code de commerce, sanctionnant cette pratique entre partenaires commerciaux, le déséquilibre est apprécié plus étroitement, (en excluant les abus portant sur l’objet principal du contrat ou l’adéquation du prix), clause par clause, (et non selon l’équilibre général du contrat), et la sanction est moindre. Ce nouvel article intéressera notamment les agents commerciaux (tout comme les professionnels libéraux), à qui seraient imposées des clauses contractuelles, par exemple, entièrement profitables à leurs mandants, sans aucune contrepartie ou justification, ou qui mettraient à leur charge une obligation lourde.

La consécration de l’interdépendance de contrats liés

Dans le cas d’un ensemble de contrats liés, tels que par exemple les contrats de crédit-bail, est dorénavant consacré le fait que si vous dénoncez le contrat de location, le contrat de financement devient caduc.

Comment éviter le risque d’une immixtion du juge dans l’adaptation du contrat

Dans un contrat de longue durée, il conviendra de prévoir une clause d’imprévision, en cas de circonstances non prévisibles lors de la conclusion du contrat et qui en rendraient l’exécution excessivement onéreuse (par exemple, un changement de technologie ou une augmentation conséquente des coûts de matières premières). Une telle clause stipulera soit la résolution pure et simple, soit les modalités d’une renégociation. Le recours au juge devra être expressément exclu, pour lui préférer en cas d’échec des négociations, un expert ou un arbitre. A défaut, le juge pourra, à la demande d’une seule partie, s’immiscer dans la liberté contractuelle, pour résoudre ou réviser le contrat (ou, pire, son prix), en se faisant en tout état de cause assister d’un expert, si les enjeux dépassent les seuls aspects juridiques.

Une nouvelle protection en cas d’avantages manifestement excessifs obtenus en abusant d’un état de dépendance

Si vous êtes en état de dépendance économique, (en raison, par exemple, de l’impossibilité de trouver des clients ou fournisseurs économiquement et techniquement comparables), vous pourrez critiquer un engagement auquel vous avez souscrit sous la contrainte, et qui confère à votre cocontractant un avantage excessif. La sanction en sera la nullité et, le cas échéant, des dommages et intérêts pour rééquilibrer le contrat.

L’inefficacité de clauses contredisant une obligation essentielle

Les clauses de limitation ou d’exonération de responsabilité gagneront dorénavant à être justifiées (en contrepartie par exemple d’une réduction de prix, ou de risques technologiques assumés ou de développement pris en charge par votre société). A défaut, de telles clauses pourront être dépourvues de toute efficacité, si elles sont considérées comme portant atteinte à une obligation essentielle.

La formalisation et rationalisation des solutions apportées à l’inexécution des contrats

En cas d’inexécution par une partie de ses obligations, vous aurez dorénavant le choix, après mise en demeure, et sans nécessairement recourir au juge, de :

  • suspendre l’exécution du contrat, si l’inexécution suffisamment grave est soit avérée, soit même manifestement suspectée, sous réserve d’une simple notification dans les meilleurs délais,
  • forcer l’exécution, par exemple en saisissant le juge pour obtenir la remise de la chose achetée, sous certaines conditions,
  • faire exécuter l’obligation par un tiers puis en demander le remboursement,
  • réduire unilatéralement le prix de manière proportionnelle, si vous n’avez pas encore payé,
  • sortir du contrat en prononçant unilatéralement sa résolution (à condition que l’inexécution soit suffisamment grave, et même en l’absence d’une clause résolutoire).

Quant aux clauses résolutoires prévues dans vos contrats, il faudra dorénavant les modifier en listant les engagements dont l’inexécution pourrait donner lieu à résolution, sans quoi elles seront dépourvues d’efficacité.

Les innovations de la réforme pourraient constituer un atout pour les entreprises, qui sauront en anticiper les effets avec l’aide de leurs conseils.

Le 15/03/2017

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