Au cœur d’un contexte sanitaire et économique incertain, les dirigeants français ont la responsabilité de prévenir les éventuelles difficultés auxquelles peuvent être confrontées leurs entreprises demain. Comment ?

Les effets de la crise sanitaire du Covid-19 ont et auront bel et bien d’importants retentissements sur l’économie et les entreprises françaises. En réalité, ceux-ci s’ajoutent à une situation déjà fragilisée depuis une dizaine d’années. Face à cette situation, les chefs d’entreprises sont en proie à davantage de difficultés financières et se sentent souvent désorientés.

Prévoir ou subir, tel est l’enjeu pour l’entreprise

Le constat aujourd’hui est que la crise actuelle n’a pas encore atteint son paroxysme au sein du monde de l’entreprise : peu de demandes d’ouverture de procédures amiables, ni de procédures collectives, conséquentes à la crise sanitaire, ont été recensées à ce jour. Pourtant la vague est annoncée à partir de l’automne prochain. C’est là toute la nécessité d’intégrer ces pratiques de prévention.

Les experts du restructuring – hommes de chiffres et hommes de droit – disposent d’outils forgés par le législateur au cours de ces dernières décennies et dont l’efficacité a déjà fait ses preuves. Il est donc nécessaire – voire indispensable – que les dirigeants prennent connaissance de ces mesures qui seules leur permettront d’éviter une procédure collective et les dommages collatéraux qui en découlent.

Mandat ad hoc et la conciliation, instruments efficaces si initiés suffisamment tôt

Dans un cadre strictement confidentiel, ces outils ont pour objet de réunir les principaux créanciers de l’entreprise, sous l’égide d’un professionnel désigné par le Président du Tribunal de commerce (mandataire ad hoc ou conciliateur), en charge de négocier des accords destinés à réduire ou rééchelonner les dettes, de manière à pérenniser l’activité et les emplois qui y sont attachés. En tout état de cause le dirigeant reste à la tête de son entreprise, et le professionnel désigné par le Président ne fait que l’assister.

La conciliation reste la pratique la plus encadrée des deux. Elle s’inscrit impérativement dans un délai de 5 mois maximum, tandis que le mandat ad hoc peut être théoriquement renouvelé autant de fois que nécessaire. Comme pour le mandat ad hoc, la procédure de conciliation nécessite en principe de démontrer que l’entreprise ne se trouve pas en cessation de ses paiements ou qu’elle ne s’y trouve « que » depuis moins de 45 jours.

Elle a également la particularité de conférer à l’apporteur d’argent frais un privilège dit de « new money » par lequel il primera l’ensemble des créanciers, ou presque, en cas d’ouverture subséquente d’une procédure collective. Cet apporteur d’argent frais ne pourra donc se voir imposer les délais du plan éventuel.

Toujours dans le cadre de la conciliation, l’entreprise peut solliciter du Président du Tribunal qu’il lui accorde un échéancier de paiement – ou un report pur et simple – pouvant atteindre 24 mois. À ce sujet et en corrélation avec le contexte actuel, le Gouvernement a récemment pris des mesures exceptionnelles permettant, par exemple, d’obtenir du Président du Tribunal de commerce une suspension des poursuites des créanciers sur simple demande du chef d’entreprise.

Le renforcement des mesures de prévention par le législateur

Durant la période d’état d’urgence sanitaire, le gouvernement a en effet décidé de créer une sorte de « parenthèse », permettant à l’entreprise victime de la crise actuelle de solliciter plus facilement la protection du Tribunal.

C’est la raison pour laquelle, la notion de cessation des paiements a été provisoirement neutralisée de l’analyse des juridictions, et ce à compter du 12 mars 2020 – date de début de l’état d’urgence sanitaire et jusqu’au 23 août 2020. Le dirigeant dispose ainsi d’une protection renforcée lui permettant de faire usage s’il le souhaite de l’ensemble des outils mis à sa disposition. Par ailleurs, une conciliation ouverte pendant l’état d’urgence sanitaire (et jusqu’au 23 août 2020) pourra être prorogée de 5 mois supplémentaires.

L’expérience sur le terrain quant-à-elle démontre que le recours à ces mesures de prévention connaît un franc succès : elles permettent de restructurer le passif de l’entreprise et d’éviter le recours à une procédure collective.

Tout l’intérêt de ces mesures exceptionnelles réside dans l’anticipation d’éventuels risques à venir. C’est ce qu’on appelle la prévention ; prévenir c’est choisir la sécurité et la protection de son entreprise car bien souvent, lorsque les difficultés apparaissent, il est déjà trop tard pour réagir. Pour se faire, il est important que les dirigeants prennent conscience de la présence d’experts dans leur entourage et qu’ils se manifestent bien en amont des risques pour espérer sauver leur entreprise.

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Fondée par des professionnels du restructuring, l’association Prévention et Retournement – basée à Marseille et à Lyon – constitue un lieu de rencontres et d’échanges au bénéfice des entreprises quelles que soient leur taille ou leur activité.

 

Retrouvez l’article de Bernard BOUQUET, fondateur, associé et co-gérant de BBLM Avocats, sur La Tribune.

Vous pouvez également télécharger l’article en texte intégral, au format pdf.

 

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A jour au : 27 juillet 2020

Philippe WALLAERT

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