Les abus de position dominante sont étroitement surveillés par l'ADLC et les tribunaux.
L'article L. 420-2 du Code de commerce interdit tout abus de position dominante par une entreprise ou groupe d'entreprises quand il a pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence.
Le premier paragraphe de cet article contient une liste non exhaustive d'exemples comme le refus de vente, les ventes liées, les conditions de vente discriminatoires ou la rupture d'une relation commerciale au seul motif que le partenaire victime de la rupture refuse d'accepter des conditions commerciales injustifiées.
L'article L. 420-4 du Code de commerce consacre le principe d'exemptions individuelles à condition que l'entreprise concernée démontre les gains de productivité de la pratique et que la pratique réserve aux consommateurs une partie équitable du profit.
L'ADLC utilise le cadre analytique de la Commission européenne. Voir question 6 dans la rubrique « accords verticaux ».
En droit français, il n'existe pas de seuil de chiffre d'affaires au-dessus duquel les autorités ou les tribunaux présument qu'une entreprise est en situation de position dominante. Toutefois, l'ADLC considère qu'une part de marché supérieure à 50% est un indice de position dominante.
L'ADLC peut retenir une position dominante au-delà de 40 % selon la nature du marché, les parts de marché des concurrents, les contraintes exercées par d'autres concurrents, le type de clients visés et la maturité du marché.
Etre en position dominante n'est pas illégal en soi et n'a pas de conséquences dès lors que l'entreprise n'abuse pas de sa position dominante. Toutefois, certaines pratiques doivent être surveillées de près dès lors que l'entreprise concernée a une part de marché significative. Parmi ces pratiques figurent le refus de vente, les ventes liées etc. Sont contrôlés non seulement les effets effectifs mais également les effets potentiels.
L'analyse économique doit être utilisée comme un outil utile pour évaluer la domination sur un marché et notamment pour définir les marchés pertinents de produits, les marchés géographiques, pour déterminer la méthodologie de calcul des parts de marché, pour définir le degré de compétition effective, les concurrents potentiels et l'exercice d'une puissance d'achat compensatrice pour les clients.
La part de marché joue un rôle clé dans l'évaluation d'une position dominante, comme évoqué au point 3.4.
L'article L. 420-4 du Code de commerce prévoit des exceptions à l'interdiction des abus de position dominante telles que :
Les pratiques résultant de l'application d'une disposition légale ou réglementaire ;
Les pratiques répondant aux critères suivants : (i) les pratiques contribuent au progrès économique notamment par la création ou le maintien d'emplois, (ii) elles réservent une part équitable du profit aux consommateurs, (iii) elles n'éliminent pas la concurrence pour une part substantielle des produits en question et (iv) elles n'incluent pas de restrictions qui vont au-delà de ce qui est strictement nécessaire pour atteindre le progrès économique visé.
Voir question 4.
La règlementation s'applique aussi aux cas de domination collective conformément à l'article L. 420-2 du Code de commerce. L'ADLC analyse trois conditions cumulatives fournies par la jurisprudence européenne : (i) la transparence du marché i.e. chaque membre du groupe concerné doit avoir la possibilité de connaître le comportement des autres membres afin déterminer s'il entend adopter le même comportement, (ii) la possibilité d'une coordination tacite et durable et (iii) l'absence de conte stabilité prévisible des consommateurs et concurrents quant aux résultats attendus de la politique commune.
Les entreprises doivent être en mesure d'adopter une politique commune sur le marché et d'agir indépendamment de leurs concurrents et clients. La domination collective n'implique pas nécessairement une absence de concurrence entre les parties.
La règlementation relative aux abus de position dominante s'applique aux acheteurs comme aux fournisseurs dominants.
Les conduites potentiellement abusives qui entrent dans le champ de l'article L. 420-2 du Code de commerce incluent notamment : les systèmes de rabais, les prix discriminatoires, les accords d'exclusivité, les compressions de marges, le dénigrement, les prix prédateurs, les ventes liées et l'usage de pratiques anticoncurrentiels résultant d'un monopole légal.
De plus, conformément à l'article 102 du TFUE, une pratique abusive peut consister à « a) imposer de façon directe ou indirecte des prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction non équitables, b) limiter la production, les débouchés ou le développement technique au préjudice des consommateurs, c) appliquer à l'égard de partenaires commerciaux des conditions inégales à des prestations équivalentes, en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence, d) subordonner la conclusion de contrats à l'acceptation, par les partenaires, de prestations supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n'ont pas de lien avec l'objet de ces contrats ».
La propriété intellectuelle peut jouer un rôle dans l'analyse des abus de positions dominantes. En effet, l'utilisation de droits de propriété intellectuelle par une entreprise peut être abusive quand celle-ci est en position dominante. Par exemple, le refus d'accorder une licence peut être considéré comme abusif, en particulier si les droits de propriété intellectuelle sont qualifiés d'infrastructure essentielle. Néanmoins, la titularité d'un brevet ou d'autres droits de propriété intellectuelle ne donne pas nécessairement à l'entreprise une position dominante.
Les refus d'entretenir une relation commerciale ne sont pas considérés comme anticoncurrentiels en eux-mêmes. Néanmoins, dans certaines circonstances, ils peuvent être considérés comme anticoncurrentiels lorsque l'entreprise concernée est en position dominante.
S'agissant des refus de vente, trois conditions cumulatives doivent être établies afin de déterminer si un refus de vente présente ou non un caractère anticoncurrentiel : (i) le caractère essentiel du produit auquel l'accès est refusé, (ii) l'effet sur la concurrence et (iii) la nature innovante du produit.